Le Petit journal
SUPPLÉMENT ILLUSTRE
Les générations actuelles ne peuvent imaginer ce qu' était la presse avant l'apparition du journal à cinq centimes, du journal populaire mis à la portée de toutes les bourses.
La presse ne jouissait d' aucune liberté. Des législateurs ombrageux lui avaient fait un code bizarre et l' avait reléguée hors du droit commun. Son état était d'exception. Le gouvernement ne souffrait d' elle rien qui pût, non pas même le blesser, mais simplement l'égratigner. On exigeait des journaux de lourds cautionnements ; une censure jalouse les surveillait de près ; à la moindre critique, à la plus petite allusion politique, les amendes tombaient sur eux dru comme grêle ; à la récidive, c'était l'interdiction.
Le Petit Journal est un quotidien parisien, fondé par Moïse Polydore Millaud, qui a paru de 1863 à 1944. À la veille de la guerre de 1914-18, c'est l'un des quatre plus grands quotidiens français d’avant-guerre, avec Le Petit Parisien, Le Matin, et Le Journal. Il tire à un million d'exemplaires en 1890, en pleine crise boulangiste.
Les origine
Le fondateur du titre est Moïse Millaud. Issu d'une famille juive de Bordeaux, il a débuté dans les affaires et les affaires de presse dès la monarchie de Juillet avec des publications financières ou judiciaires. En 1856, il rachète la Presse de Girardin mais son échec lui fait comprendre que cette formule, nouvelle vingt ans plus tôt, est maintenant dépassée.
Il en confie la direction gérance à son neveu Alphonse (né le 11 juin 1829 à Mouriès), fils de son frère Joseph.
Les particularités
Le Petit Journal attire de nombreux lecteurs car il est bon marché (5 centimes au lieu de 15 centimes pour les journaux ordinaires), il a un format commode (43 × 30 cm), il est accessible à tous (pas d'abonnement), il propose un contenu distrayant (fait divers, feuilleton, horoscope et chronique), journal sans politique, il est dispensé du timbre même si une partie de son contenu est politique. Il est l'emblème d'une nouvelle forme de journalisme qui se développe, celle de la petite presse.
« Le pas du commandité », Georges Clemenceau attaqué par Le Petit Journal (éd. du 19 août 1893) lors de la campagne électorale d'août 1893. En premier plan, Cornélius Herz, l'affairiste du scandale de Panama, avec un « nez sémitique ».
Ce qui augmente les ventes, c'est lorsque que le
Petit Journal publie des faits divers extraordinaires. C'est notamment le cas avec l'affaire Troppmann, septembre 1869. Tout Paris se presse à Pantin, où l'on vient de découvrir sept cadavres appartenant à une même famille. Autour de la fosse, on a monté une fête foraine. Devant l'émotion suscitée par cette tuerie, Alphonse Millaud, patron du Petit Journal, décide de couvrir abondamment le fait divers. Immédiatement, le pays tout entier se passionne pour l'histoire de cette famille odieusement massacrée. La police arrête un certain Jean-Baptiste Troppmann alors qu'il tentait d'embarquer pour les Amériques. Il a sur lui les papiers et les bijoux de l'infortunée famille. Pour Millaud, l'affaire Troppmann se révèle une mine d'or. Le tirage du Petit Journal passe de 200 000 exemplaires par jour à 300 000, puis à 500 000. Cette exploitation des faits divers devient alors la stratégie éditoriale du journal sur laquelle beaucoup d'historiens ont porté un jugement sévère
Dès 1884, paraît l'hebdomadaire le Supplément illustré, dont le tirage atteint 1 million d'exemplaires en 1895. L'illustration couleur fut une innovation du Petit Journal.
En 1899, Le Petit Journal annonce 5 millions de lecteurs
Le premier numéro sort le 1er février 1863, et dès octobre, dépasse avec 83 000 exemplaires, le plus fort tirage des journaux sérieux comme Le Siècle qui publie 50 000 copies. Deux ans plus tard, à lui tout seul, le tirage du Petit Journal avec 259 000 exemplaires est supérieur à l'ensemble de la presse parisienne. En 1870, il atteint 340 000 exemplaires, soit le double du tirage de la presse parisienne. Ses progrès avaient aussi été rendus possibles grâce aux presses rotatives que Hippolyte Marinoni (1823-1904) mit au point pour lui dès 1867. En 1882, Marinoni prend le contrôle du journal, succédant à Girardin. Malgré quelques crises – Émile de Girardin en prit le contrôle en 1873 avec Gibiat, Jenty et Marinoni –, son audience ne cessa d'augmenter et aucun de ses concurrents ne put mettre sa suprématie en cause ; son tirage atteignit 500 000 exemplaires en 1878, 1 million en 1890.
Le Petit Journal est alors l'un des trois principaux journaux français. Ce journal de presse populaire expédie 80 % de son tirage en province.
A lire aussi
http://cent.ans.pagesperso-orange.fr/menu/historique.htm
Dont voici un extrait
Le Petit Journal et son supplément illustré
Le " Petit Journal " est l' un des plus anciens journaux de France. Il est née en 1863 et sa création doit être considérée comme l' un des événements qui marquèrent le plus profondément dans la vie du Paris de naguère. Dans l' histoire de la presse, c' est plus qu' un simple épisode ; c' est la date mémorable d' une véritable révolution, non pas seulement dans le journalisme, mais dans les moeurs
Les générations actuelles ne peuvent imaginer ce qu' était la presse avant l' apparition du journal à cinq centimes, du journal populaire mis à la portée de toutes les bourses. La presse ne jouissait d' aucune liberté. Des législateurs ombrageux lui avaient fait un code bizarre et l' avait reléguée hors du droit commun. Son état était d' exception. Le gouvernement ne souffrait d' elle rien qui pût, non pas même le blesser, mais simplement l' égratigner. On exigeait des journaux de lourds cautionnements ; une censure jalouse les surveillait de près ; à la moindre critique, à la plus petite allusion politique, les amendes tombaient sur eux dru comme grêle ; à la récidive, c' était l' interdiction.
C' est assez dire que la masse du peuple, les ouvriers,les employés, les petits bourgeois étaient condamnés à ne point lire les journaux. Les gens aisés eux-mêmes y regardaient à deux fois avant de s' abonner à un journal. Les uns allaient lire gazette au cabinet de lecture ; d' autre s' entendaient entre voisins pour prendre un abonnement à l' une des grandes feuilles de Paris.
Millaud n' avait, en créant, d' autre intention que de donner au peuple, tous les jours, un écho de la vie nationale : informations, fait divers, chroniques inspirées par les événements d' actualité, causeries sur le théâtre, variétés, romans, mais pas de politique ! La politique, c' était alors la mort certaine. Et il fallait vivre. Le Petit Journal vécut .
Jean LECOCQ. ( Almanach 1940 )
La presse à 1 sou .
Le Petit Journal ( Journal à 1 sou : 5 c) créé le 1-2-1863 par Moïse (dit Polydore) Millaud, non politique et donc non timbré, de demi-format, 4 pages ( 6 en 1901 )
L' objectif étant de séduire le maximum de lecteur afin d'attirer les publicitaires, la stratégie dominante est de vendre au prix le plus faible possible. En 1863, Moïse Polydore Millaud lance à grands renforts de publicité « Le Petit Journal » ; c'est le premier journal français dont la stratégie est accès sur le sensationnel. Le prix de vente est également modique afin d'en faire un journal populaire. Pour ne pas avoir à payer le timbre (5 centimes par numéro) qui eût rendu l'entreprise impossible, le journal était apolitique. Les autorités du second Empire favorisèrent le développement de cette feuille bon marché et de ses concurrentes. Après le 4 septembre 1870, le timbre supprimé, Le Petit Journal put parler de politique. Malgré quelques crises - en 1870, plus de 400 000 exemplaires, on compte, en 1892, un million d'exemplaires. Girardin en prit le contrôle en 1873. En 1937, il ne tirait plus qu'à 150 000 exemplaires, quand il devint l'organe du Parti social français.Replié à Clermont-Ferrand en juin 1940, Le Petit Journal y vécut, médiocrement, jusqu'en 1944; durant cette période, il reçut chaque mois une subvention du gouvernement de Vichy. Des publications hebdomadaires annexes, la plus célèbre fut son Supplément illustré en couleurs, dont les images offrent un très pittoresque exemple des curiosités et de l'idéologie populaire de la fin du siècle. Cette réussite provoque une montée en flèche de ce nouveau genre de périodique, (le Petit Parisien par exemple. Le Petit Parisien fondé par Louis Andrieux ; en 1879,1er n° le 16-10-1870. La presse a donc, tout au long du 19 eme siècle, évolué en fonction de son public et des nouvelles possibilités techniques. Après la loi de 1881 et pendant les années 1890, la presse va se caractériser par la diversité, chacun des français à son journal. A la fin du siècle, le terrain est préparé à la crise qui va bientôt secouer le pays : Les journaux deviennent un véritable pouvoir, parce que connus de tous.